Blueberry, intégralement
Replonger dans les aventures du Lieutenant Blueberry, alias "Nez cassé" et ne pas le regretter.
Si ce n'est pas une madeleine, ça y ressemble. Le problème
avec ce genre de gâteaux c'est qu'ils ont vite dépassé la date de péremption.
Or Mike Blueberry n'a rien d'un vieux biscuit rance, tout au plus le Lieutenant
rebelle a pris quelques rides mais croyez-moi, le bougre n'a rien perdu de sa
vitalité légendaire (comment fait-il ?) Il faut dire que le gars de l'Ouest
était bien né sous les plumes d'indiens tels que Charlier au scénario et Giraud/Gir
au dessin.
Mon adolescence étant de l'histoire assez ancienne, c'est avec
un œil neuf que j'ai redécouvert les 23 volumes de la série
"régulière".
J'ai tout relu consciencieusement, dans l'ordre, sans
oublier la moindre onomatopée ni le plus petit chariot bâché planqué dans un
coin du décor et c'est passé comme une lettre à la poste, le plaisir en plus. Bien
sûr, la forme est d'époque, datée fin des 60's et début des 70's. Mais le temps
n'a rien changé à la qualité de cette série marqué du charme viril d'un
Blueberry sans âge.
Le Scénario, épique, naïf parfois, manichéen mais pas trop,
m'a attrapé comme, le gamin que j'étais devant les "financiers" de la
boulangerie de mon quartier. Bien sûr, il y a du texte sur chaque planche,
beaucoup de texte, des expositions et des dialogues à rallonge. Souvent les
dialogues tiennent du surréalisme tant ils sont parsemés de perles qui font
nécessairement sourire aujourd'hui. Même les gangsters de bas étage s'expriment
dans un langage soutenu où le subjonctif a encore toute sa place !
Le découpage de la série en aventures qui regroupent sauf
exception (l'homme à l'étoile d'Argent par exemple) 2 ou 3 tomes est très malin. Ce qui est encore
plus fort, c'est que toute la saga "Blueberry" forme un ensemble parfaitement
cohérent. Tout se tient du début à la fin; c'est l'histoire d'une vie, c'est Balzac
revisité dans l'Ouest sauvage, l'ennui en moins. D'ailleurs les multiples références
aux épisodes précédents sont là pour nous rappeler que Mike Blueberry ne vient pas
de nulle part, que ses aventures sont liées d'une manière ou d'une autre aux
histoires passées. Il y a des cicatrices qui ne s'effaceront jamais. Il y a des
(mauvais) coups du sort qui participeront de l'errance du Lieutenant. Il y a
aussi que les amitiés comme les haines continueront de jalonner la vie du héros
au fil des épisodes. Bref, c'est la vie et on peut y croire si on accepte de
rencontrer un personnage toujours capable de renaître de ses cendres, un héros
mythique à la fois fragile et indestructible.
C'est efficace, bien construit et je le répète, ça marche !
On croit le genre Western tombé en désuétude ? Relire Blueberry, c'est lui
offrir une cure de jouvence.
L'atout maître de cette bande dessinée est justement … le
dessin. Le trait de Gir est artistiquement parlant, rien de moins qu'inégalable.
Mieux que ça, il fait souvent naître l'émotion alors que je ne m'y attendais
pas. Le dessin est au summum et la magie opère dans chaque case de chaque
planche de chaque tome de la série ou presque. C'est cette constance dans la
qualité du dessin que je trouve remarquable.
Une immersion dans les grandes cases offre au lecteur, au
spectateur devrait-on dire, un voyage dans l'univers de Gir. Les plus infimes
détails du décor sont autant de découvertes pour l'œil. La mise en scène de
l'action comme des paysages (les forts, les villes, quelle virtuosité!) est
tout aussi remarquable. Bien sûr, on notera que le style s'est affirmé année après
année, que le trait s'est affiné, que les couleurs sont devenues plus subtiles
au fil des saisons.
Décidément Blueberry est une œuvre originale et passionnante
à découvrir ou à redécouvrir.
Damned !
A noter, Chez Dargaud les 7 volumes des "Intégrales"
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